AVANT PREMIERE NATIONALE
CinéMassy et notre groupe s’associent pour vous présenter le film « Rebelle » du réalisateur Kim Nguyen.
Le thème en est les enfants-soldats notamment en République Démocratique du Congo.
Le débat sera animé par Kim Nguyen, Rachel Mwanza (principale actrice) et Lionel Quille (responsable de la commission « Enfants » d’Amnesty France).
LE FILM
Un film authentique, puissant et touchant Tourné entièrement en République démocratique du Congo, Rebelle raconte l’histoire d’une jeune enfant, Komona, qui se retrouve prise dans l’engrenage d’un commando d’enfants soldats.
Hantée par l’assassinat de ses parents, la jeune fille de 14 ans va tenter malgré tout de vivre sa vie et de se faire une place dans un environnement difficile, et c’est le moins qu’on puisse dire.
Aux côtés d’un autre jeune garçon qu’on appelle Magicien (Serge Kanyinda), la petite Komona (Rachel Mwanza) va devenir l’atout principal du Grand Tigre Royal, chef suprême des rebelles.
Plus qu’un film-choc sur l’univers des enfants-soldats, Rebelle est surtout un voyage dans la vie de cette petite fille. Le film renforce aussi la thèse selon laquelle dans ces conflits (oubliés), les jeunes filles et les femmes sont les premières victimes.
Pour son tout premier rôle au cinéma, Rachel Mwanza est époustouflante. La jeune Congolaise a d’ailleurs remporté l’Ours d’argent de la Meilleure actrice à la Berlinale de 2012 pour son interprétation sans tache d’une enfant qui n’a jamais demandé de grandir avec une Kalachnikov.
Rien ne prédisait pourtant ce succès inattendu. Au départ, Kim Nguyen travaillait sur deux jumeaux, Johnny et Luther Htoo, devenus les figures sacrées d’un groupe de rebelles en Birmanie.
Les aléas du scénario et de la recherche l’ont ensuite conduit en Afrique. Indubitablement le choix du Congo, avec ses complexités, ses antagonismes, ses paradoxes, mais bien évidemment ses richesses (mal) exploitées, au premier rang duquel le coltan (qui sert notamment à fabriquer les téléphones intelligents) s’est imposé pour le réalisateur de Truffe et La Cité.
Ce dernier a aussi réussi à ne pas se perdre dans le piège de l’explication à outrance du pourquoi et du comment de la situation. Il permet à chacun de se faire une idée et d’en tirer ses conclusions.
« C’est un film à la limite du rêve et de la réalité, c’est un drame en constante mutation, et c’est un film rempli de paradoxes », souligne d’ailleurs le réalisateur.
Pour autant, n’eut été la prestation remarquable des acteurs-enfants, le film n’aurait peut-être pas été aussi percutant. Kim Nguyen en est conscient, il l’assume pleinement.
► Qu’est-ce qu’un enfant-soldat ?
Un enfant-soldat est un être humain âgé de moins de 18 ans, recruté par une armée ou participant simplement à un conflit armé. Leur recrutement commence dès l’âge de 10 ans.
Le droit international actuellement en vigueur fixe à 15 ans l’âge minimal pour le recrutement dans l’armée et la participation aux conflits. Pourtant, la Convention internationale des Droits de l’Enfant fixe à 18 ans l’âge adulte. Un enfant-soldat n’est pas seulement un membre d’un groupe armé qui participe activement aux hostilités. Un enfant-soldat ne porte pas nécessairement un uniforme et une arme : il peut être recruté dans un groupe armé en tant que cuisinier, porteur, gardien, espion, messager, garde du corps, esclave sexuel, « détecteur » de mines…
► Combien d’enfants-soldats ?
Même si les chiffres sont difficiles à établir, on estime entre 200 000 et 300 000 des enfants faisant fonction de soldats aussi bien pour des rebelles que pour des forces régulières dans des conflits armés. Sur le 21 conflits armés recensés entre 2002 et 2007, on compte environ 100 000 enfants de moins de 18 ans en Afrique atteignant parfois jusqu’à 70% des groupes armés. La plupart sont des garçons mais les filles représentent une minorité substantielle.
► Pourquoi recruter des enfants-soldats ?
Par manque d’adultes volontaires, mais aussi parce que les enfants sont plus dociles, plus obéissants, et plus facilement manipulables que les adultes.
Plus inconscients face aux dangers, ils « coûtent aussi moins chers » !
Combiné avec des questions comme la pauvreté, le manque d’accès à l’éducation ou à une formation, la discrimination et la vulnérabilité, les enfants sont des cibles faciles pour le recrutement par des groupes armés. Les enfants orphelins, non accompagnés ou vivants dans un environnement familial difficile, y voient une solution à leurs problèmes, et faire partie d’un groupe armé semble plus sûr que de les affronter. La vengeance, l’identité communautaire et l’idéologie peuvent aussi influencer les enfants.
Cependant, le recrutement forcé est courant et est un processus soigneusement planifié, dans lequel les enfants sont enlevés et torturés. En cas de recrutement forcé, les recruteurs ciblent typiquement les lieux où les enfants sont les plus vulnérables et où ils sont rassemblés en grand nombre : les enfants sont notamment enlevés dans les écoles, les orphelinats, les camps de réfugiés, les stades et les églises. Les enfants sont évalués selon leur taille et leur condition physique.
Pour les soumettre, les recruteurs n’hésitent pas à les violer, les battre, les torturer et même à assassiner les membres de leur famille… lorsqu’ils ne les obligent pas à le faire eux-mêmes.
► Témoignage
« Ils vous donnent une arme à feu, et vous devez abattre votre meilleur ami. Ils font ça pour voir s’ils peuvent vous faire confiance. Si vous ne le tuez pas, votre ami reçoit l’ordre de vous tuer. J’ai dû le faire, parce que sinon j’aurais été tué. C’est pour ça que je suis parti. Je ne pouvais plus supporter tout ça. »
Colombie, garçon recruté à l’âge de 7 ans par un groupe paramilitaire.
► République Démocratique du Congo
► Cour pénale internationale Une série de cartes didactiques du « Dessous des cartes » Cour pénale internationale – Mondialisation de la justice
► Thomas Lubanga Dyilo, né le 29 décembre 1960, est le président national de l’Union des patriotes congolais (UPC) qu’il a créée en 2001, et qui a été soutenue par l’Ouganda puis le Rwanda. Recherché pour crimes de guerre, il est le premier individu condamné dans l’histoire de la Cour pénale internationale (CPI).
Le 14 mars 2012, M. Lubanga a été déclaré coupable des crimes de guerre consistant à avoir procédé à l’enrôlement et la conscription d’enfants de moins de 15 ans et à les avoir fait participer activement à des hostilités. Le 10 juillet 2012, il a été condamné à une peine totale de 14 ans.
La peine prononcée prend en compte le fait que Thomas Lubanga est en détention depuis son arrestation en 2006. Les procureurs avaient requis une peine de 30 ans.
Voir ici la vidéo de la comdamnation
« Cette première condamnation est un moment historique. Elle avertit le monde entier que quiconque recrute ou utilise des enfants comme soldats s’expose à un procès et une peine d’emprisonnement, a déclaré Michael Bochenek, directeur chargé du droit et de la stratégie politique au sein d’Amnesty International.
« Le jugement rendu aujourd’hui montre que la Cour pénale internationale fonctionne bien. »À la suite de la décision prise par le ministère public de limiter les chefs d’accusation à la conscription, l’enrôlement et l’utilisation d’enfants soldats, la CPI n’a pas pu examiner les allégations faisant état d’autres crimes commis par les Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC) lorsqu’elles étaient sous le commandement de Thomas Lubanga – dont des crimes de violence sexuelle –, ce qui a privé potentiellement de justice et de réparations de nombreuses autres victimes.
La CPI a toutefois ajouté ces crimes en mars au mandat d’arrêt déjà décerné à l’encontre d’un des seconds de Thomas Lubanga, Bosco Ntaganda, qui dirige actuellement le groupe armé M23 dans la province du Nord-Kivu (est de la République démocratique du Congo).« Il est essentiel que les prévenus des procès à venir soient jugés sur la base d’un acte d’accusation complet plutôt que pour un nombre de chefs d’inculpation réduit par commodité », a souligné Michael Bochenek.
L’une des trois juges siégeant lors de ce procès a rédigé une lettre exprimant sa différence d’opinion vis-à-vis de la décision majoritaire pour le jugement, dans laquelle elle indique que, à son avis, celle-ci n’a pas tenu compte de l’étendue du préjudice subi par les victimes et leurs familles, ni des sévères punitions violentes, et notamment sexuelles, infligées aux enfants enrôlés.
Le juge présidant le tribunal, Adrian Fulford, a cependant déclaré que, même si les crimes étaient effectivement très graves, la cour avait pris en considération le degré de coopération de Thomas Lubanga tout au long de son procès.
Thomas Lubanga a été arrêté en mars 2006 pour des crimes commis en 2002-2003, période pendant laquelle il a enrôlé de force des enfants soldats au sein des FPLC. Son procès devait débuter en 2007 mais a finalement commencé en 2009, pour aboutir à un verdict final en mars 2012.Thomas Lubanga a été le fondateur présumé et le président de l’Union des patriotes congolais (UPC), ainsi que le commandant en chef de son aile militaire, les FPLC. Les FPLC ont été impliquées dans de nombreuses atteintes aux droits humains, dont l’enlèvement d’enfants et leur utilisation comme soldats. Le recrutement et l’utilisation d’enfants par des groupes armés congolais et étrangers dans le conflit armé restent d’actualité. L’armée nationale
congolaise a elle aussi eu recours à des enfants soldats. Les forces du M23 de Bosco Ntaganda continuent d’enrôler de force des civils, dont des enfants. Amnesty International a reçu à plusieurs reprises des informations indiquant que des civils avaient été tués après avoir refusé de rejoindre le M23.À présent, le processus de réparation pour les victimes de ces crimes va commencer. Cependant, étant donné que le jugement n’a statué que sur un ensemble de crimes assez restreint, le nombre de victimes pouvant prétendre à des réparations est plus petit qu’il ne l’aurait été si les chefs d’accusation avaient été étendus.
En effet, il ne représente qu’une infime partie des personnes qui ont réellement subi des atteintes aux droits humains perpétrées par ces hommes.
Par ailleurs, les procureurs n’ont pas récupéré les actifs liés à Thomas Lubanga pour contribuer à payer pour ses crimes, si bien que le paiement des indemnités incombera au Fonds de la Cour pénale internationale au profit des victimes et aux gouvernements des États. Le Fonds au profit des victimes a augmenté en mars sa réserve pour les crimes poursuivis par la CPI, de 158 000 livres (200 000 euros) à 951 000 livres (1,2 million d’euros), à la suite du verdict de culpabilité concernant Thomas Lubanga, mais malgré cette mesure, il lui sera difficile de faire face aux importantes demandes de réparations, d’autant plus que les gouvernements nationaux ont réduit leurs contributions aux fonds comme celui-ci en raison de la crise financière mondiale.
► Pour aller plus loin
A VOIR :
Pour les enfants à partir de 8 ans : Spectacle Théâtre visuel cirque et marionnette « La gigantea » par Compagnie « Les 3 clés »
A ECOUTER : Chronique de Véronique Gaymard sur RFI
A LIRE :
1- « Contrôlez les armes » Un ouvrage de référence signé Amnesty International, conçu dans le prolongement de la campagne «Contrôlez les armes» et fondé sur les rapports et l’expertise d’Amnesty International dans ce domaine. Préface de Lilian Thuram – Éditions Autrement – Boutique AIF
2- Pour les enfants : « L’ennemi » Edition Sarbacane – Boutique AIF