Retour sur le ciné-débat « Les femmes du bus 678 »


Tout d’abord, merci aux 23 signataires de la pétition adressée au Président Morsi.

En complément de notre précédent post sur le même sujet, ajoutons que le film Les Femmes du bus 678 réalisé par Mohamed Diab a été en grande partie inspirée par le retentissant premier procès qui a eu lieu en 2008 pour harcèlement sexuel.

Le pays connait aujourd’hui, pour la deuxième fois, des poursuites judiciaires engagées pour ce type de harcèlement.

Exhibitionnisme, mains baladeuses, attouchements, le harcèlement sexuel est longtemps resté tabou en Égypte. Phénomène social banalisé, il est aussi utilisé comme une arme politique pour briser l’engagement des militantes.

Michel Fournier nous a exposé la pluralité des causes avancées pour expliquer ce phénomène social :
Le caractère profondément patriarcal de la société égyptienne.
Le consumérisme qui encouragerait à considérer la femme comme un objet.
La frustration sexuelle liée au recul de l’âge du mariage devenu très coûteux dans un contexte économique tendu, conjuguée aux normes sociales qui prohibent les relations sexuelles avant la noce…
Et sans doute pour beaucoup le facteur démographique, l’exode rural des populations pauvres fraîchement installées en zones péri-urbaines est une situation de frustrations profondes sur bien des points : économique, social et de fait sexuel…

Avant la révolution, il y avait une forte oppression psychique et émotionnelle, précise Heba Habib, psychiatre spécialiste des violences faites aux femmes. Le harcèlement est aussi une manière pour les hommes de redistribuer la violence dont ils sont eux-mêmes victimes.

Les conséquences sont multiples : anxiété en présence d’un homme, dérèglement du comportement alimentaire (anorexie pour ne plus avoir de poitrine, boulimie pour se protéger), sans compter les problèmes de sexualité.

Verbal, gestuel ou physique, le harcèlement sexuel est quotidien au Caire.

Selon une étude conduite il y a quatre ans par le Centre Égyptien pour le Droit des Femmes, 83 % des femmes interrogées déclaraient avoir été harcelées sexuellement.
Le chiffre atteignait 98 % pour les étrangères et 62 % des hommes reconnaissaient avoir déjà harcelé sexuellement une femme.

« Il faut toujours être en alerte, changer de trajectoire, se déplacer à plusieurs, prendre le wagon pour les femmes dans le métro, raconte une étudiante. Et le fait d’être vêtue d’une abaya ne change rien. Même ma mère refuse de m’écouter quand je me plains de ça. »

Longtemps taboue, cette question est désormais discutée sur Internet, les chaînes télévisées satellites, dans la presse et même dans certaines familles. La révolution est passée par là en libérant la parole.
Mais, cet usage n’est réservé aujourd’hui qu’aux « classes supérieures » urbanisées et la population est encore à 60% rurale.
Les quasi 20% de population péri-urbaine qui ont déserté les campagnes vivent dans un état de frustrations multiples, y compris sur le plan sexuel.
Ainsi, ce fléau semble s’être intensifié. La police judiciaire, omniprésente sous le régime de Moubarak, s’est en effet volatilisée après la révolution, soit par peur des représailles des révolutionnaires, soit par obéissance aux ordres de ses supérieurs.

Par ailleurs et en toile de fonds, l’impunité des forces militaires et forces de police règne.

Des « tests de virginité » visant les femmes
Le 9 mars 2011, après que des soldats eurent chassé avec violence les manifestants de la place Tahrir, au moins 18 femmes ont été placées en détention sous la garde de l’armée.

Dix-sept d’entre elles ont été incarcérées pendant quatre jours. Certaines d’entre elles ont dit à Amnesty International que durant leur détention, des soldats les ont frappées, leur ont infligé des décharges électriques et les ont soumises à des fouilles au corps. Elles ont alors été forcées à subir des « tests de virginité » et menacées de poursuites judiciaires pour prostitution.

Avant leur libération, ces femmes ont comparu devant un tribunal militaire, qui les a condamnées à des peines d’un an de prison avec sursis pour une série d’infractions inventées de toutes pièces.

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