MALAISIE : UN ÉTUDIANT MILITANT DÉTENU RISQUE D’ÊTRE TORTURÉ
Le militant étudiant Ali Abdul Jalil a été roué de coups par des gardiens de prison en Malaisie et est inculpé au titre de la Loi relative à la sédition. Il s’agit d’un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d’expression. Il risque de subir des actes de torture ou des mauvais traitements.
Ali Abdul Jalil a été arrêté le 8 septembre et inculpé devant le tribunal de district de Selayang, dans l’État de Selangor, au titre de l’article 4(1)(c) de la Loi relative à la sédition, pour des commentaires soi-disant critiques envers la monarchie. Il a été relâché dans la même journée après avoir déposé une caution de mise en liberté de 5 000 ringgits malaisiens (environ 1 200 euros), mais a été immédiatement arrêté et inculpé devant le tribunal de district de Shah Alam, pour deux chefs d’accusation supplémentaires, au titre du même article de la Loi relative à la sédition. Il a été incarcéré pendant 15 jours à la prison de Sungai Buloh, dans l’État de Selangor. Durant sa détention, il a été insulté et maltraité physiquement par un gardien de prison qui lui a donné des coups de poing dans le ventre, l’a giflé et lui a frappé la jambe à coups de matraque et de tuyau en caoutchouc. Sa famille n’a pas été autorisée à lui rendre visite pendant ses 12 premiers jours de détention.
Ali Abdul Jalil a de nouveau été libéré sous caution le 23 septembre, avant d’être immédiatement arrêté et envoyé à la prison de Johor Bharu Selatan, où il est toujours détenu. Il est désormais inculpé de trois chefs au titre de l’article 4(1)(c) de la Loi relative à la sédition. Les charges sont liées à des commentaires considérés comme « séditieux » postés sur les réseaux sociaux le 21 janvier et le 18 août 2014 – notamment des commentaires qui, selon les autorités, tournaient en dérision le sultanat de Johore et réclamaient l’abolition de la monarchie en Malaisie. Ali Abdul Jalil est inculpé et détenu uniquement pour avoir exercé sans violence son droit à la liberté d’expression et Amnesty International le considère comme un prisonnier d’opinion.
ACTION RECOMMANDEE : lettre international / email / fax :
– demandez aux autorités de libérer immédiatement et sans condition Ali Abdul Jalil, et de garantir que toutes les charges retenues contre lui soient abandonnées, car c’est un prisonnier d’opinion détenu uniquement pour avoir exercé sans violence son droit à la liberté d’expression ;
– exhortez-les à garantir qu’Ali Abdul Jalil ne soit pas torturé ni maltraité, qu’il ait régulièrement accès à sa famille et aux avocats de son choix, et qu’il soit détenu dans des conditions conformes aux normes internationales ;
– demandez-leur de mener une enquête rapide, indépendante et efficace sur les allégations selon lesquelles Ali Abdul Jalil a été torturé et maltraité en garde à vue, et de faire en sorte que les responsables présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables, sans recours à la peine de mort, ni à d’autres sanctions cruelles, inhumaines ou dégradantes ;
– appelez-les à abroger immédiatement la Loi relative à la sédition, à abandonner les charges pesant sur les personnes accusées de « sédition » et à annuler les condamnations de toutes celles reconnues coupables de cette infraction, uniquement pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression.
MERCI D’ENVOYER VOS APPELS AVANT LE 6 NOVEMBRE 2014 À :
Premier ministre
Datuk Seri Najib Tun Razak
Prime Minister’s Office of Malaysia
Main Block, Perdana Putra Building Federal Government Administrative Centre, 62502 Putrajaya, Malaisie
Fax : +60 (0)3 8888 3444
Courriel : ppm@pmo.gov.my Formule d’appel : Monsieur le Premier ministre,
Procureur général
Tan Sri Abdul Gani Patai
Attorney General’s Office
No. 45, Persiaran Perdana, Precint 4
62100, Putrajaya, W.P Putrajaya
Malaisie
Fax : +60 (0)3 8890 5670
Courriel : pro@agc.gov.my Formule d’appel : Monsieur le procureur général,
Copies à :
Président de la Commission malaisienne des droits humains (SUHAKAM)
Tan Sri Hasmy Agam
11th Floor, Menara TH Perdana,
Jalan Sultan Ismail, 50250
Kuala Lumpur, Malaisie
Fax : +60 (0)3 2612 5620
Courriel : humanrights@suhakam.org.my
Ambassade de Malaisie
2bis rue de Bénouville – 75116 Paris
Tél : 01.45.53.11.85 – Fax : 01.47.27.34.60
Courriel : malparis@kln.gov.my
Tarifs postaux pour la Malaisie :
Lettre internationale (20 g) : 0.98 €
COMPLÉMENT D’INFORMATION
Depuis deux mois, les autorités malaisiennes recourent de plus en plus à la Loi relative à la sédition, loi héritée de l’époque coloniale britannique qui érige en infraction toute critique du gouvernement, afin de faire taire les dissidents pacifiques. Deux étudiants militants ont récemment été reconnus coupables et condamnés au titre de cette loi. Adam Adli a été condamné à un an de prison le 19 septembre, et Safwan Anang à 10 mois le 5 septembre. Depuis début août, au moins huit personnes, dont Ali Abdul Jalil, ont été inculpées pour des déclarations considérées comme « séditieuses » en vertu de la Loi relative à la sédition. Ces huit personnes – Ali Abdul Jalil et Wan Ji Wan Hussin, Chow Mun Fai, David Orok, Azmi Sharom, N. Surendran, Khalid Samad et RSN Rayer – comptent parmi 15 personnes accusées de sédition (voir l’AU 231/14, http://www.amnesty.org/fr/library/info/ASA28/009/2014/fr).
Le 22 septembre, la police malaisienne a annoncé qu’elle rouvrait une enquête pour sédition au sujet d’un discours livré par le dirigeant de l’opposition Anwar Ibrahim lors d’un rassemblement politique en mars 2011, dans lequel il critiquait le gouvernement.
Amnesty International juge très préoccupante la Loi relative à la sédition, qui érige en infraction toute une série d’actes, notamment les actes « tendant à inciter au mécontentement envers ceux qui exercent le pouvoir ou envers le gouvernement », ou le fait de « remettre en cause un sujet » protégé par la Constitution. Les personnes reconnues coupables sont passibles de trois années d’emprisonnement et d’une amende de 5 000 ringgits (environ 1 200 euros). La Loi relative à la sédition n’est pas conforme au droit international relatif aux droits humains ni aux normes internationales en la matière. Elle viole le droit à liberté d’expression, reconnu dans l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et garanti par l’article 10 de la Constitution malaisienne.
En outre, Amnesty International est préoccupée par les informations persistantes faisant état d’actes de torture et de mauvais traitements infligés aux prisonniers en Malaisie, causant parfois leur mort en détention. Le pays est tenu de respecter les règles du droit international coutumier, qui interdit la torture et les mauvais traitements en toutes circonstances.